APOLLODORE

Le jugement de Pâris, l'enlèvement d'Hélène, Ulysse et Palamède

Ugo Bratelli, 2002

Épitomé, III, 1-9

III, 1. Mais plus tard Alexandre enleva Hélène, à l’instigation de Zeus, dit-on : de cette manière, sa fille deviendrait célèbre, pour avoir déclenché une guerre entre l’Europe et l’Asie. D’autres, toutefois, soutiennent que Zeus cherchait ainsi à glorifier la race des demi-dieux.

III, 2. Quoi qu’il en soit, Éris lança une pomme, prix de la plus belle, et invita Héra, Athéna et Aphrodite à entrer en compétition. Zeus ordonna à Hermès de la porter à Alexandre, sur le mont Ida, pour qu’il soit leur juge. Toutes promirent à Alexandre des dons. Héra lui offrit, s’il lui accordait la victoire, la souveraineté sur tous les hommes ; Athéna lui promit la victoire à la guerre ; et Aphrodite l’amour d’Hélène. Il choisit Aphrodite. Sur des navires construits par Phéréclos, Alexandre partit pour Sparte.

III, 3. Le jeune homme resta l’hôte de Ménélas pendant neuf jours ; mais le dixième, le roi dut partir pour la Crète, afin d’assister aux funérailles de son grand-père, Catrée ; Alexandre persuada Hélène de s’enfuir avec lui. Hélène abandonna sa petite fille, Hermione, âgée de neuf ans ; elle emporta tous les biens qu’elle put et, de nuit, elle s’enfuit avec Alexandre.

III, 4. Mais Héra provoqua une terrible tempête qui les contraignit à jeter l’ancre à Sidon. Alexandre, redoutant d’être poursuivi, s’attarda en Phénicie et à Chypre. Quand ensuite il estima le danger passé, il gagna Troie avec Hélène.

III, 5. Cependant, certains déclarent que Hermès, sur ordre de Zeus, enleva Hélène, la mena en Égypte et la confia à Protée, le roi des Égyptiens. Alexandre serait allé à Troie en compagnie d’un simulacre d’Hélène, fait de nuées.

III, 6. Quand Ménélas s’aperçut de l’enlèvement, il alla à Mycènes chez son frère Agamemnon, et lui demanda de rassembler, depuis la Grèce tout entière, une armée pour marcher contre Troie. Agamemnon dépêcha des messagers auprès de chacun des rois, en leur rappelant leur ancien serment, et exhorta chacun à combattre pour la sécurité de leur propre femme, car cet affront avait touché la Grèce entière. La plupart d’entre eux était favorable à la guerre. Ils se rendirent aussi à Ithaque, chez Ulysse.

III, 7. Mais Ulysse n’avait aucunement l’intention de participer à la guerre ; il fit mine d’être fou. Palamède, le fils de Nauplios, comprenant qu’il les trompait, décida de le confondre. Alors qu’Ulysse feignait un accès de démence, il le suivit ; puis, brusquement, il arracha des bras de Pénélope son petit enfant Télémaque, et sortit son épée comme s’il voulait le tuer. Craignant pour son fils, Ulysse avoua son jeu, et participa à la guerre.

III, 8. Ulysse captura un Phrygien et le contraignit à écrire une fausse lettre, comme si elle avait été envoyé par Priam à Palamède, et qui révélait une trahison ; ensuite, après avoir caché de l’or dans la tente de Palamède, il fit tomber la lettre au milieu du camp. Agamemnon la lut, trouva l’or et remit Palamède aux alliés afin qu’il soit lapidé comme traître.

III, 9. En compagnie d’Ulysse et de Talthybios, Ménélas se rendit à Chypre, chez le roi Cyniras, pour l’amener à participer à l’expédition. Cyniras offrit des cuirasses, dons pour Agamemnon, et jura qu’il enverrait cinquante navires ; par la suite il n’en envoya qu’un, commandé par le fils de Mygdalion, les autres étaient de petites embarcations de terre cuite qu’il jeta à la mer.